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Paillage et irrigation : Une méthode alternative en évaluation en verger

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La maîtrise de l’enherbement du rang en verger est un défi qui conduit les arboriculteurs à explorer différents types de méthodes alternatives au désherbage chimique. L’utilisation de paillages plastiques et de bâches tissées est une technique encore peu répandue. La Pugère et l’Ardepi évaluent l’intérêt de la technique et son impact au travers de différents critères.

La station d’expérimentation de La Pugère s’intéresse, depuis peu, à l’utilisation des paillages plastiques et autres bâches tissées, afin d’apporter aux professionnels toutes les informations utiles sur leur mise en œuvre, leur coût, mais aussi leur impact sur le développement des arbres, et sur la disponibilité en eau dans le sol. À l’occasion d’une journée organisée à Mallemort, Vincent Lesniak présentait un essai comparatif sur les performances techniques de différents paillages que l’on peut retrouver sur le marché. Mis en place sur un jeune verger de poiriers (2015), il compare : une modalité travail du sol avec un paillage micro perforé plastique ; un paillage tissé ; un paillage tissé bio-compostable ; un paillage en jute ; ainsi qu’un paillage en feutre. “L’idée est d’abord d’observer la durabilité de ces paillages dans le temps”, explique Vincent Lesniak.

Pas de concurrence sur les premières années
Le paillage micro-perforé plastique (80 microns), utilisé en maraîchage, semble le plus limité. Après deux ans d’utilisation, il a déjà percé, ce qui rend la gestion des herbes très problématique.
Avec un paillage tissé, plus résistant (maille de 130 g/m²), aucune recolonisation des mauvaises herbes n’a été observée. Même constat pour le paillage tissé bio-compostable.
Plus naturels, les paillages en jute et en feutre présentent l’avantage de se dégrader à la parcelle, mais leur durée de vie est intermédiaire. Leur détérioration est survenue relativement rapidement, avec une recolonisation du rang sur le dessus du paillage, qui n’a cependant pas gêné le développement des plants. Le paillage feutre s’en sort un peu mieux, mais n’ira pas au-delà des trois ans. En revanche, le paillage en jute se fissurait déjà sur le dessus au bout d’un an et demi, malgré une épaisseur de 150 g/m².
“Les arbres ne sont aujourd’hui pas encore entrés en production, mais les mesures de circonférence des troncs sont assez homogènes et, surtout, leurs gains sont supérieurs sur les arbres situés sous paillage, comparativement à ceux placés en sol nu”, commente Vincent Lesniak.
Au final, c’est le paillage tissé, plus compact et résistant, qui supporte le mieux le temps. Il permet de mieux gérer le passage des roues d’un broyeur.
Le grammage et la largeur du rouleau utilisé sont aussi des variables à prendre en compte, comme la technique de pose qui peut grandement faire varier les coûts à l’hectare. Tous ces paramètres doivent encore être synthétisés pour chacun des paillages.


Une meilleure gestion de l’eau
L’autre aspect auquel la station s’intéresse est l’impact du paillage sur la consommation en eau. Dans un essai parallèle, l’Ardepi a suivi l’efficience d’apport d’eau sur une modalité désherbée, comparativement à une modalité avec paillage plastique et une autre avec un paillage tissé. Muni d’outils connectés et innovants, Nicolas Savajols, de l’Ardepi, a pu mesurer l’humidité du sol sur chacune de ces modalités. Il a utilisé des sondes capacitives en plaçant un capteur tous les 10 cm, jusqu’à 60 cm, pour observer la réaction du sol aux apports d’eau, par goutte-à-goutte sous paillage, et par irrigation suspendue pour la modalité sol nu. Pour réaliser un pilotage fin sur la parcelle par rapport aux différentes modalités, des boîtiers connectés Solem, fonctionnant avec une interface web, ont aussi été utilisés. Ces outils permettent de piloter à distance, et de déclencher les irrigations après ouverture des électrovannes.
Sur une première année d’essai, quelques résultats significatifs apparaissent déjà. “Nous avons enregistré 30 % d’apport d’eau en moins sur les paillages tissés et plastiques, par rapport à la référence désherbage mécanique et chimique. Cela s’explique parce que le sol - beaucoup plus séchant sans le paillage - a nécessité des apports d’eau supplémentaires pour maintenir les humidités à un niveau semblable”, indique le technicien de l’Ardepi.
Les sondes utilisées sur l’essai ne se contentent pas de mesurer uniquement l’humidité du sol : elles mesurent également la température sur chaque capteur et la salinité de la solution de sol, ce qui permet de comparer l’effet température du paillage par rapport au témoin. Sur la première année, aucune différence significative entre les différents paillages n’a été observée. Mais 
la température est bien plus élevée sous les paillages, laissant à penser que la minéralisation pourra potentiellement être plus importante sous paillage, stimulant alors davantage la vie du sol. Sur 2019 et 2020, l’essai va se poursuivre avec les mêmes outils, pour confirmer la réduction des apports en eau sur des cultures paillées, comparativement à des cultures installées sur sol nu. Mais l’on sait déjà que l’utilisation des sondes est une source d’informations précieuses pour un suivi fin du pilotage de l’irrigation. Comme le précise Vincent Lesniak, “pour une meilleure valorisation de l’eau par rapport à la consigne d’apport, l’intérêt est aussi de recouper les données du sol, récupérées grâce aux sondes, avec ce que l’on observe sur l’arbre, via notamment les mesures de flux de sève”. 
Emmanuel Delarue

Légende photo :  Vincent Lesniak, La Pugère, a présenté l’essai sur l’évaluation de la durabilité de différents paillages dans le temps, lors d’une réunion technique organisée sur la station expérimentale début juillet.

 

Source Agriculteur Provençal. Auteur : Emmanuel DELARUE