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SIA 2023 : Les arboriculteurs au bord de l’implosion

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Cela fait plusieurs semaines, voire mois, que la pression monte dans la filière arboricole alpine

Après l’opération d’arrachage et d’information des consommateurs avec une action dans les supermarchés haut-alpins et sisteronais les arboriculteurs des Hautes-Alpes et des Alpes-de-Haute-Provence ont décidé de frapper plus fort pour faire entendre leur voix. 

S’ils étaient présents sur les stands lors du Salon international de l’agriculture pour faire découvrir leur savoir-faire et leurs produits, ils l’étaient également pour montrer leur colère et faire passer un message à grand renfort de t-shirt et de slogans explicites : « Nous avons le droit de manger ce que nous n’avons pas le droit de produire », « Producteurs dépouillés jusqu‘au trognon », #paietonproducteur, « Stop aux normes franco-françaises bien plus restrictives que les normes européennes qui précipitent la faillite de notre filière », « Normes franco-françaises les producteurs de pommes en prennent plein la poire »…

Étranglés de toute part, les producteurs sont mis à mal aussi bien par les coûts de production qui flambent que par la concurrence déloyale des pommes étrangères, notamment polonaises, qui affluent sur le marché français sans la moindre réaction de l’État, voire sa complaisance.

Détresse et colère mêlées

C’est pourquoi, une vingtaine d’arboriculteurs a pris la direction du Marché d'intérêt national (MIN) de Rungis mercredi 1er mars, dès potronminet, pour aller à la rencontre des metteurs en marchés qui commercialisent ces pommes polonaises et étrangères qui ne répondent absolument pas aux normes auxquelles sont astreints les producteurs hexagonaux. « Nous voulions discuter avec eux du pourquoi et du comment mais surtout les alerter sur le fait que nous nous n’y arrivions pas, explique Jérôme Samuel, co-président du Groupement fruitier des Hautes-Alpes, le visage très fermé et soucieux. Nous devons sensibiliser à la détresse des arboriculteurs qui sont face à des problèmes multiples : charges, main-d’œuvre, produits phyto, énergie… Mais également les contraintes de cahiers des charges imposés par les grandes et moyennes surfaces qui nous pénalisent alors qu’ils vendent des pommes polonaises. » 

Le producteur révèle que l’Association nationale pommes-poires (ANPP) a fait tester des échantillons de ces pommes étrangères et que des résidus de pesticides et de produits phytosanitaires y ont été découverts mais que rien n’est fait. La preuve en est puisque lors de leur visite du MIN de Rungis les arboriculteurs ont pu voir des pommes importées mais également « francisées » par un metteur en marché qui avait déjà été visé l’an dernier. « Il faudrait un traçage au kilo près pour les fruits et les légumes, déclare Jérôme Samuel. Nous avons demandé quoi faire car il faut que tout le monde aille dans le même sens sans se bloquer de marchés. Il est important de comprendre que la situation est grave. »

S’ils ont essayé de faire bonne figure et de montrer un visage positif de leur profession lors de ce SIA les arboriculteurs n’en restent pas moins vigilants et près à se mobiliser à nouveau pour faire entendre leur voix mais surtout leur désespoir.

Alexandra Gelber

Mais aussi…

Lancement du plan de souveraineté fruits et légumes

Le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire a profité du SIA 2023 pour annoncer le lancement d’un plan de souveraineté pour la filière des fruits et légumes. « Ce plan permet d’accompagner cette filière dans le renforcement de sa capacité productive tout en répondant aux enjeux de planification écologique, explique le ministère. Aujourd’hui, la moitié des fruits et légumes consommés dans notre pays sont issus de l’importation. Depuis l’an 2000, la France a perdu 14 points d’approvisionnement et cette tendance s’accentue. La filière des fruits et légumes est un pilier de notre souveraineté alimentaire, de notre action d’adaptation au changement climatique et de la transition agro-écologique. Le gouvernement avait annoncé dès mars 2022 sa volonté d’accompagner cette filière essentielle. » 

Entre septembre 2022 et janvier 2023, une concertation a été lancée « afin de partager nos ambitions, confronter les avis ainsi que construire, collectivement, une stratégie et une vision commune ».
L’objectif de ce plan est de gagner cinq points de souveraineté en fruits et légumes dès 2030 et enclencher une hausse tendancielle de dix points à horizon 2035.

Il devrait permettre d’engager des transformations structurelles de la filière pour renforcer durablement la capacité productive de la filière : modernisation et décarbonation du parc de serres, renouvellement et renforcement de la résilience des vergers, agroé-quipements innovants, recherche-développement et innovation. Il vise également à améliorer la protection des cultures. 

En plus du soutien financier du CASDAR à la recherche et innovation et à l’appui à la structuration des programmes opérationnels à hauteur de 120 M€ par an, une priorisation des financements de France 2030 permettra d’accélérer et massifier l’innovation. Ces financements viendront compléter les crédits européens et nationaux mobilisés par les collectivités qui souhaitent s’engager dans ce plan, et par les filières. 

Ce plan pluriannuel se déploiera jusqu’à 2030, pour assurer une continuité dans l’action. Dès 2023, l’objectif est de mobiliser 200 M€ en faveur de la filière fruits et légumes, dont au moins 100 M€ du guichet agro-équipements et une maximisation de l’enveloppe de France 2030 dédiée à la recherche-développement et innovation.

Ce plan visera à adapter chaque bassin de production aux nouveaux contextes climatiques, en liaison avec les régions et l’ensemble des collectivités locales.

Article paru dans L'Espace Alpn n° 430 du vendredi 10 mars 2023