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Autonomie alimentaire : Des filières engagées et dynamiques

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Avec leurs problématiques, les filières agricoles et agroalimentaires de la région sont, à quelques exceptions près, loin de couvrir en volume les besoins du territoire. Elles restent pourtant dynamiques et ne manquent pas d'ambition.

Vaste question que celle de l'autonomie alimentaire en région Sud. Les ingénieurs agronomes de la région Paca ont voulu s'y frotter, en sollicitant des professionnels du monde agricole, des élus impliqués et des représentants d'institutions expertes du sujet, pour confronter leurs points de vue. La rencontre était organisée dans le cadre d'un événement piloté par leur association, les 'Agros de Paca', au siège de la Société du canal de Provence, au Tholonet, le 23 novembre.

D'après l'Ademe, l'agence de la transition écologique, le constat est sans appel en ce qui concerne le système alimentaire en région : son niveau d'autonomie alimentaire sur la production agricole atteint seulement 12 %. Les productions transformées s'en sortent un peu mieux avec 38 %. Alors doit-on, et surtout peut-on, produire plus ? Faut-il arrêter d'exporter ou encore changer notre consommation ? Telles sont les questions qu'il convient de poser, si l'objectif visé est d'atteindre cette fameuse autonomie.

Car la production agricole de la France a bel et bien décroché avec, depuis quatre ans consécutifs, une baisse des volumes produits sur le territoire. L'agriculture est effectivement en pleine mutation, le monde agricole également. Car la responsabilité qui pèse sur les agriculteurs de demain est gigantesque. Cependant, si rien n'est simple, dans les filières et sur le terrain, les agriculteurs - et ceux qui les accompagnent - ne baissent pas les bras et se mobilisent. C'est ce qui ressortait des témoignages de plusieurs représentants de cinq filières emblématiques de la région. À leur échelle et avec leurs moyens, chacune active ses leviers pour agir.
Des productions de niches, mais pas seulement

La filière ovine régionale par exemple est loin d'être autonome (17 %), mais ce n'est pas une spécificité régionale : au niveau national, le secteur autoconsomme environ 50 %. Historique et très présente dans la région, avec 1 300 éleveurs et plus de 500 000 brebis, la filière répond aussi à d'autres attentes sur les territoires. Sur "l'occupation de l'espace, l'utilisation du territoire, la valorisation des espaces naturels. De plus, nos systèmes d'élevage sont extrêmement extensifs et produisent assez peu. Les races avec lesquelles travaillent les éleveurs sont avant tout rustiques. En quantité comme en volume, les niveaux sont assez faibles. Mais les progrès sont tout à fait possibles. La dynamique d'installation sur la filière est d'ailleurs très positive, même si le foncier reste une vraie problématique", rapporte Patrice Roucolle, directeur de Maison de l'élevage.

En pomme, les problématiques sont très différentes : la région est en effet excédentaire par rapport à ses besoins. Globalement dans les territoires provençaux et haut-alpins, la pomme produite localement représente un quart de la production française avec 350 000 tonnes environ avec, en regard, des besoins en consommation estimés à 45 000 t de frais et 25 000 t de pommes transformées. La question de l'autonomie alimentaire en quantité ne se pose pas, mais la véritable interrogation est de savoir "comment on s'assure que ce sont bien les pommes du territoire que l'on retrouve dans les différents circuits commerciaux de la région. C'est sur cela que l'on doit agir pour pouvoir parler d'autonomie alimentaire", constate Pierre Venteau, directeur de l'Association nationale pommes poires.
Des stratégies de filières

Pour la filière de la tomate transformée, la région Paca concentre 70 % de la production nationale, mais ne couvre que 12 % des besoins du territoire. La production a baissé avec ses 150 000 t actuellement, bien inférieure à celle de ses concurrents, comme l'Italie par exemple. "Environ 90 % des sauces tomate que les Français consomment proviennent d'ailleurs, de pays qui ne disposent pas forcément des mêmes atouts et conditions que les nôtres", rappelle Robert Giovinazzo, directeur de la Sonito. La filière française ne dispose pas de signe de qualité, "mais nous travaillons à faire remonter les volumes avec une approche à l'échelle d'un territoire élargi. Le projet 'Tommates' - qui cible plusieurs filières - vise de nouveaux modèles de production, avec notamment la création d'îlots conciliant les multiples attentes auxquelles l'agriculture doit répondre", précise-t-il. Ici, l'objectif est de passer à 25 % de taux de couverture de la consommation, à l'horizon 2030.

Avec l'huile d'olive, on change encore d'échelle, puisque la production française équivaut à moins de 1 % de la production mondiale et 5 % de la consommation française. "La filière a fait un choix : celui de conserver des variétés, un modèle de production traditionnel, de travailler sur l'origine pour aller chercher de la valorisation. Elle s'appuie aujourd'hui sur huit appellations d'origine protégées sur l'ensemble du territoire. Les leviers se situent sur la professionnalisation de la filière, pour essayer de développer la production. Il s'agit de produire plus certes, mais également mieux et différemment - avec de la haie fruitière - et aussi plus régulièrement, pour aller grignoter quelques pourcentages", explique Laurent Bélorgey, président des interprofessions France Olive et France Amande.

Sur l'amande - qui s'est relancée il y a quelques années, avec 2 000 hectares plantés et 1 000 t de production franchies cette année (contre 40 000 t importées) -, la filière est en construction. "L'idée est de continuer à développer cette filière qui avait quasiment disparu, pour atteindre les 4 % à 5 % d'autonomie, avec l'objectif de travailler aussi sur l'origine de l'amande française", indique Laurent Bélorgey. Codirecteur de la société Amandera - dont l'objectif est la restauration des sols et de la biodiversité dans plusieurs territoires de l'Hexagone -, Rémy Frissant veut quant à lui "repenser l'agriculture" : sa structure a mis en place des programmes d'exploitation dans le Lot-et-Garonne, avec un verger durable de noisetiers créé en 2019, mais aussi à Rognes, dans le Pays d'Aix, avec de l'amande. "Nous voulons montrer que l'on peut à la fois retravailler sur les sols, la biodiversité et produire de la qualité en agriculture biologique, tout en ayant un impact économique et social positif", indique Rémy Frissant.
Soutien des partenaires

Une démarche vertueuse qui traduit aussi la voie sur laquelle les filières agricoles et agroalimentaires de la région sont engagées. Dans les territoires, les agriculteurs ne sont pas seuls à relever ces défis. "Ils s'appuient déjà sur leurs Chambres d'agriculture pour s'installer au départ, puis acquérir des compétences tout au long de leur carrière", indique André Bernard, président de la Chambre régionale d'agriculture (CRA Paca). Toutefois, sans foncier ni eau, impossible de produire. Dans ces domaines, les Chambres s'investissent aussi pour préserver et optimiser ces fondamentaux.

La CRA Paca soutient également "l'émergence de nouvelles filières et les démarches de signes de qualité. En effet, l'agriculture est un métier à risques. Mais à chaque mutation de la société, elle a su trouver des solutions", ajoute le président de la Chambre régionale. Mais aujourd'hui, l'agriculture est d'un côté très normée et doit, de l'autre, faire avec des marchés très concurrentiels. La capacité à produire ne peut qu'en être affectée. Toutefois, la force de l'agriculture régionale est de "savoir se réadapter et de se diversifier", rappelle Bénédicte Martin, vice-présidente de la Région Sud chargée de l'agriculture. Les agriculteurs dans leurs filières n'ont pas d'autres choix en effet que d'essayer de rebondir, et la politique régionale peut accompagner l'agriculture à surmonter ses difficultés et tendre vers plus d'autonomie alimentaire.
Des leviers en soutien

"Nous avons des leviers, des fonds européens comme le Feader. La Région accompagne notamment tous les investissements qui vont permettre d'être productifs et durables", souligne-t-elle. L'autre levier sur lequel la Région agit, c'est l'eau, puisque la collectivité "a un rôle d'animation globale sur la politique de l'eau et accompagne à la fois les Associations syndicales autorisées et la SCP pour optimiser les usages de l'eau." À cette gestion économique de la ressource s'ajoute celle du foncier. Et là encore, les situations dans les territoires sont très disparates. Mais avec le Schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet), la Région dispose d'un outil réglementaire limitant la consommation foncière de l'espace agricole. Enfin, elle vient de lancer le label '100 % Valeurs du Sud', pour miser sur une meilleure valorisation des productions agricoles et alimentaires, "afin de contribuer à l'amélioration du revenu des agriculteurs en investissant sur le champ de la distribution", conclut Bénédicte Martin.

Source : Agriculteur provençal
Auteur et © Crédit photo : Emmanuel Delarue

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