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Mobilisation : « La gestion du loup par l'État est un échec ! »

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Vendredi 15 octobre une mobilisation nationale contre la prédation était organisée par les syndicats, plusieurs événements ont eu lieu dans les deux départements alpins

Le 15 octobre dernier, au moins 150 agriculteurs ont participé à la manifestation régionale devant la préfecture de Gap pour « montrer à l’État qu’on est au bout du bout ! », interpellant les pouvoirs publics : « Qu’ils nous disent s’ils ont encore besoin de nous ! » 

Déjà, près de 60 % de la consommation ovine en France est importée. Derrière ce qui s’apparente à un réel désespoir, c’est la situation occasionnée par la prédation du loup dans le département qui est omniprésente dans les esprits. Pour autant, les organisations syndicales, FDSEA et JA, ainsi que la Chambre d’agriculture, avaient appelé à un rassemblement dans le calme. Message entendu. Y compris par la préfète, Martine Clavel, qui a répondu à l’invitation de venir à la rencontre des éleveurs au moment de partager un repas improvisé et, comme à l’accoutumée, parfaitement réussi.

Les propos tenus par les différents intervenants ont été musclés néanmoins. Patrick Lévêque, qui préside la FRSEA, a soutenu ce mouvement, expression « du ras-le-bol général » et a martelé : « La gestion du loup par l’État est un échec puisqu’il se développe ! », égratignant le traitement humain fait aux éleveurs, ou plutôt l’absence de traitement humain dans la problématique de la prédation. « L’État pense qu’avec le ruissellement d’argent, ça suffit ; il se trompe » ajoutait-il.

Le plan loup veut protéger à la fois le loup et le pastoralisme

Éric Lions, président de la chambre consulaire, surenchérissait : « On n’a jamais réussi à faire prendre conscience aux pouvoirs publics de la problématique loup ». Le loup étend son territoire d’année en année, une quarantaine de départements sont désormais concernés, « c’est peut-être notre chance » notait Éric Lions. La perspective d’un territoire hexagonal entièrement ou presque occupé par le canis lupus devrait susciter une réaction de l’État, pense-t-il. 

Sur le terrain haut-alpin, la situation ne cesse de se dégrader. 1 200 chiens de protection, dont une forte majorité de patous, sont désormais présents, mais la pression de la prédation demeure aussi élevée qu’une décennie auparavant quand ces mêmes chiens étaient en petit nombre. De patous, il en est question comme jamais cet automne. La faute à deux d’entre eux qui ont mordu quatre randonneurs ou promeneurs l’été dernier à Ceillac. Ce qui a valu à leur propriétaire, éleveur, de comparaître devant le tribunal correctionnel de Gap, à la demande du procureur de la République qui a requis deux mois de prison avec sursis. Réquisition qui a exaspéré le monde de l’élevage (voir le verdict page 2).

« Ce procès de l’éleveur est un phénomène nouveau » déplorait Christian Hubaud, élu de Pellautier et agriculteur, qui relevait l’impact psychologique de cet épisode. « Notre profession est en danger. Quel avenir pour les jeunes ? » 

Cette jeunesse était présente au rassemblement, des élèves du lycée agricole de Gap qui assurent avoir la passion de l’élevage ovin chevillée au corps. Ils en auront besoin pour mener à bien leur pro-jet professionnel. Depuis plusieurs années, la cohabitation impossible, du moins à l’heure actuelle, entre loup et pastoralisme a pris une tournure inquiétante. C’est devenu un affrontement entre monde urbain et rural. « Comment faire aujourd’hui pour que ces deux mondes se parlent ? » lançait le maire et conseiller départemental. René Laurans, président de la FDSEA 05, se risquait à dire que «  notre ennemi, c’est l’État ! », emboîtant le pas de ceux qui pointent la défaillance de l’État dans la gestion du loup. C’est dire, sans nul doute, le désespoir du monde agricole. Florian Pellegrin, président régional des JA, résumait la situation engendrée par la politique des gouvernements successifs : « Le plan loup veut protéger à la fois le loup et le pastoralisme ; ça marche pour le loup, mais pas pour le pastoralisme ! ».

Maurice Fortoul

Article paru dans L'Espace Alpin n° 400 du 5 novembre 2021