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Le côté obscur des pertes en eau des plantes dévoilé

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Une découverte de l’Institut Agro et de l’Inrae ouvre des perspectives originales pour sélectionner des plantes plus économes en eau.

Les feuilles perdent de l’eau par transpiration au travers de minuscules pores appelés stomates. Chez la plupart des plantes, les stomates s’ouvrent le jour et se ferment la nuit. Une nouvelle étude de l’Institut Agro et de l’Inrae, parue dans The Plant Cell, montre que les stomates se rouvrent pendant la nuit selon le niveau d’amidon stocké dans les feuilles la veille. Cette découverte révélée dans un communiqué de l'Inrae daté du 7 juin ouvre des perspectives originales pour sélectionner des plantes plus économes en eau.

Mais selon les espèces ou même les variétés, il subsiste une transpiration nocturne résiduelle à l’origine de pertes en eau « non productives ».
Il y a plus d’un siècle, des observations au microscope ont révélé que les stomates se rouvrent partiellement au cours de la nuit (cf. références). Cette réouverture des stomates est dépendante du rythme circadien, l’horloge interne à la plante calée sur les alternances de rayonnement entre jour et nuit. De son côté, l’amidon dans les feuilles agit comme une horloge métabolique transitoire : l’amidon est synthétisé pendant la journée grâce à la photosynthèse, et est utilisé la nuit pour générer des sucres, ce qui fait de l’amidon la principale source d’énergie nocturne.

L’amidon donne le rythme

Les scientifiques se sont alors demandé si le métabolisme de l’amidon pouvait intervenir dans la réouverture nocturne des stomates.
Pour répondre à cette question, les auteurs ont étudié la plante modèle Arabidopsis thaliana pour analyser la transpiration des plantes. Ils ont utilisé la plateforme de phénotypage à haut débit Phenopsis et ont conçu une nouvelle série d’outils de calcul, PhenoLeaks, pour analyser la dynamique de la transpiration des plantes. Ils ont passé au crible une série de plantes dont le métabolisme de l’amidon est plus ou moins affecté. Ils ont découvert que des défauts sévères dans le métabolisme de l’amidon empêchaient les stomates de se rouvrir la nuit et, de manière inattendue, décalaient le rythme des mouvements stomatiques pendant toute la journée. Ainsi, la plante utilise l’amidon non seulement comme une source d’énergie mais aussi comme un guide pour ajuster son horloge circadienne.
Grâce à certains mutants, les auteurs ont également observé que les stomates ne réagissaient pas au stock d’amidon disponible dans leurs propres cellules de garde, mais plutôt au stock disponible à l’échelle de la feuille entière.

C’est donc l’état global des stocks d’amidon qui donne le rythme aux stomates, sans doute via les sucres générés dans les tissus internes des feuilles et qui voyagent jusqu’aux cellules de garde pour y régler « l’heure locale ». Un bon moyen pour la plante d’éviter le décalage horaire parmi ses cellules !

Cette étude pointe la nécessité de mieux comprendre le dialogue moléculaire entre les stomates et le reste de la plante afin de limiter l’utilisation « non productive » de l’eau par nos cultures. Décrypter le message qui parvient de la plante aux stomates permettrait d’établir une stratégie fiable pour sélectionner des plantes plus économes en eau la nuit, et ainsi mieux adaptées à la sécheresse.