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Quand les haies s'invitent dans les vignes

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Dans le vignoble, la haie a toute sa place. Dans le cas des haies en régénération naturelle, les interventions restent nécessaires pour sélectionner, favoriser les espèces intéressantes et former progressivement la végétation dans le temps.

Dans un verger comme dans un vignoble, la diversité des paysages favorise une diversité de la faune, augmente les fonctions de régulation et permet aux milieux d'être davantage connectés entre eux. Pour concevoir des systèmes avec une approche plus fonctionnelle de l'agrosystème, les haies ont un rôle central.

Dans un verger comme dans un vignoble, la diversité des paysages favorise une diversité de la faune, augmente les fonctions de régulation et permet aux milieux d'être davantage connectés entre eux. Pour concevoir des systèmes avec une approche plus fonctionnelle de l'agrosystème, les haies ont un rôle central. En bordure d'une parcelle de vignes, les haies bocagères ou champêtres viennent répondre à différents objectifs, notamment celui de casser les courants d'air et d'atténuer le vent. Différentes hauteurs et densités de végétaux permettent de jouer ce rôle. Mais une haie bien réalisée et mature peut protéger jusqu'à dix mètres en longueur avec un mètre de végétal. Les autres avantages d'une haie sont la limitation de l'érosion avec le maintien des sols, les prospections racinaires et leur effet sur le ruissellement. Les végétaux d'une haie vont aussi héberger toute une faune d'auxiliaires, (insectes, chauves-souris, etc.) ou d'autres mammifères prédateurs des ravageurs de cultures. La haie constitue également une aide à la pollinisation avec des essences mellifères essentielles à certaines productions. Enfin, la protection de la qualité des eaux est un autre intérêt de la haie et, au bord d'un cours d'eau, elle peut permettre de créer une première barrière de filtration des produits phyto- sanitaires.

Pour implanter des arbres qui répondent à un besoin spécifique de protection contre le vent, de création d'ombrage, de lutte contre l'érosion ou qui favorisent la biodiversité, le contexte pédologique et climatique est important, afin d'orienter le choix des essences. Leur compatibilité avec le passage des machines est aussi à penser. Engagée sur le projet SAE² (Services agroécologiques et économiques), la Chambre d'agriculture propose aux agriculteurs de mettre en place des IAE, ou infrastructures agroécologiques, afin d'améliorer la biodiversité fonctionnelle de leur exploitation. Il peut s'agir de l'installation de nichoirs, de favoriser la présence d'auxiliaires présents, de préserver les sols avec des engrais verts, mais aussi de s'adapter au changement climatique par l'implantation et le développement de haies.


La biodiversité sous le prisme de la gestion de l'eau

Dans la plaine viticole de Puyloubier, c'est sous le prisme de la gestion de l'eau que la question de la biodiversité est réfléchie, explique Thibaud Juvenal, chargé de mission à la Chambre d'agriculture des Bouches-du-Rhône.

Dans le bassin de l'Arc et de la Touloubre, le syndicat mixte Menelik préconise d'ailleurs la conservation de bandes boisées en bordure des cours d'eau, au travers du Schéma d'aménagement et de gestion des eaux (Sage). "Ces ripisylves ont tout leur intérêt pour le maintien des berges et pour l'environnement, et des études sur leur protection ont d'ailleurs été conduites récemment", explique Thibaud Juvenal.

Sur la plaine de Puyloubier, on retrouve des fossés inutilisables ou remplis de végétation sans eau. Bien souvent, il s'agit de drains naturels ou de fossés de colature (eau excédentaire des irrigations recueillie dans des colateurs, ndlr) situés entre des parcelles ou des bords de route. Dans d'autres cas, ce sont des collecteurs d'eau pluviale ou encore des noues qui servent de tampon. La profession agricole se bat d'ailleurs pour que la cartographie du réseau hydrographique corresponde aux réalités du terrain, et que de simples fossés ou écoulements ne soient pas considérés comme cours d'eau. Toujours est-il que des ripisylves peuvent y être développées dans un intérêt agroécologique. Une rencontre technique sur le sujet - organisée sur le Domaine de Saint-Pancrace, le 10 novembre - soulignait l'importance de suivre l'évolution de la végétation dans les ripisylves.


Favoriser l'installation d'une végétation ligneuse

Chez Noémie Guez - dont les parcelles sont traversées par deux ruisseaux, l'option d'une haie en régénération naturelle a été prise il y a trois ans. Les haies visent un objectif de brise-vent, mais sont aussi censées favoriser la biodiversité fonctionnelle. Toutefois, une haie évolue dans le temps, posant ainsi la question de sa gestion et de son entretien. L'important est d'identifier et de suivre le développement des espèces intéressantes, afin de les préserver. Comme l'explique Numa Faucherre, ingénieur agronome de chez Agroof, la régénération naturelle a plusieurs intérêts. "Elle permet de créer une haie gratuitement à terme, quand on sait que le coût d'une plantation de haies est de 10 à 15 euros le mètre linéaire. L'autre intérêt est de permettre le développement de plantes spontanées et locales. Pour faciliter l'introduction de la haie, l'un des leviers consiste à faire le tri entre la végétation de transition, et de favoriser une végétation plus ligneuse et des arbres d'avenir comme le chêne, l'amandier et d'autres." Mais la vigilance s'impose pour ne pas non plus permettre la concurrence racinaire avec la vigne à proximité. C'est notamment le cas avec le drageonnement des peupliers, qui peut être contenu par des méthodes sylvicoles. Le cerclage ou annélation consiste à faire une bande de cinq centimètres de large sur les trois quarts de la tige principale, pour calmer la vigueur du végétal. La partie vivante de l'arbre est de ce fait prélevée, ce qui va conduire le végétal par sécher sur pieds et donc, limiter les effets de drageonnement.

Quand on laisse se développer naturellement une haie, le recépage des arbrisseaux peut permettre de les étoffer pour densifier la haie. Mais c'est aussi ce qui vient stimuler le drageonnement. Dans ce cas, face aux espèces invasives, la solution mécanique et le passage d'une sous-soleuse s'imposeront aussi. Pour le cas spécifique des peupliers, la conservation d'un enherbement sur les premiers rangs de vigne peut aussi venir limiter le drageonnement. Tout est question d'équilibre. Dans tous les cas, l'espèce dont on favorisera le développement ne doit pas comporter trop d'inconvénients par rapport à ses intérêts.

Source : Agriculteur provençal 17/11/2023
Auteur : Emmanuel Delarue